Mon année confinée : corona, corona…

Coronavirus. Ce mot, tout le monde le connaît à présent, peut-être même trop bien… C’est fou de se dire qu’il y a quelques mois seulement, ce nom nous était totalement étranger. Et pourtant, ce virus a fait une entrée dévastatrice dans nos vies. Si bien que le mot « coronavirus » a été à jamais marqué dans nos esprits au fer rouge.
C’est là toute la cruauté de ces 6 lettres : CORONA qui ont ravagé nos vies en un claquement de doigt. Il lui a suffit de souffler sur nous, comme si nous n’étions que poussière, pour faire basculer notre quotidien. Je me souviendrai toujours de ce vendredi 13 Mars 2020, où l’on nous a annoncé un confinement de deux semaines. Qui s’est prolongé à trois semaines, quatre, cinq, et puis finalement un an.
Je vais vous parler de ce que j’ai pu ressentir, de mon quotidien. J’ai l’impression de déterrer un vieux journal, en repensant au début de ce virus. Cela me semble si lointain, que ma mémoire peut me jouer des tours. Et quand je tourne les pages de ce journal imaginaire, je me rends compte que j’ai beaucoup changé… 

Le début

De temps en temps, je ris en me rappelant d’un cours de français que j’avais eu, quelques temps avant le drame. Nous devions piocher une feuille au hasard, où était inscrit un sujet que l’on devait traiter à l’oral. J’avais deux choix. L’un d’eux était le coronavirus, sauf qu’à l’époque je ne savais pas du tout ce que c’était. A la place, j’avais choisi le second sujet, portant sur les incendies en Australie.
Je me souviens de ce jour où j’ai vu une minorité d’élèves porter un masque. Je me souviens avoir demandé à l’un deux pourquoi il portait ce tissu encombrant sur le visage. Il m’avait dit que des rumeurs circulaient, comme quoi le virus s’était propagé en Turquie.

« Corona quoi ? »

Je ne savais pas ce que c’était, et trouvais cela plutôt drôle. Une histoire de soupe de chauve-souris, de Chine et de virus… Il y a de quoi rire franchement !
Je me souviens de ce jour où notre professeur d’histoire était absente. Elle était soi-disant porteur du covid car elle était passée dans un aéroport. Elle nous faisait le cours en visio-conférence, en grand écran sur le tableau blanc. Je trouvais cette situation ridicule, et largement exagérée. Après tout nous sommes au XXIe siècle, un simple virus ne peut rien faire !
Je me souviens de ce vendredi 13, ce dernier jour d’école. Je me souviens avoir été heureuse, deux semaines confinées sans aller à l’école, trop cool ! J’aurais aimé savoir, ce jour-là, qu’il se passerait un long moment avant que je ne revienne dans cette salle de classe.
Je me souviens avoir quitté l’école toute joyeuse, heureuse de ces « vacances » en quelque sorte improvisées. Je me souviens être montée dans le bus et d’avoir lancé un joyeux « à dans deux semaines ! » et d’être partie sans un dernier coup d’œil.

Si j’avais su, ce jour-là… J’aurais fait attention aux détails de chaque mur, chaque porte, chaque couloir, chaque salle de classe… J’aurais ancré le visage de tous mes camarades dans ma tête, j’aurais passé le maximum de temps avec eux. J’aurais mémorisé chaque parcelle du CDI, cet endroit que je chéris tant. J’aurais essayé d’apprécier ces couleurs peu glamour des murs des salles, essayé de garder un souvenir de quelque chose que je ne verrais plus jamais. J’aurais fait connaissance avec tous les professeurs que j’allais avoir l’année prochaine, sachant que pour la plupart, je ne les verrais pas en chair et en os. J’aurais fait attention à tout, ayant à l’esprit deux choses : je ne reviendrai pas ici dans deux semaines, tous ces lieux seraient bientôt renouvelés : aujourd’hui tous les murs sont blancs…
Mais à mon plus grand malheur, je ne savais pas ce qui allait arriver, ce jour-là. Alors je suis montée dans ce bus, tout sourire, acceptant ainsi, cet avenir peu radieux. Et puis, par la suite je me suis dit : « de toute façon, qu’aurais-je pu bien faire ? » La réponse est : rien, tout simplement, absolument rien. 

Mona Lisa with face mask, cottonbro / Pexels

Confinement…

Les premiers jours, je n’en garde qu’un vague souvenir. Je me souviens avoir eu tout le mal du monde à installer « Zoom », et encore plus à me connecter à un cours. Je ne peux pas vraiment dire que cela me plaisait d’apprendre à distance, mais ce n’était pas détestable comme ça l’est aujourd’hui. De plus, j’ai toujours voulu tester l’école à la maison, pensant que cela pouvait être une belle expérience. Et bien c’est chose faite, et je ne tiens pas à recommencer. Je me souviens avoir détesté porter un masque. Je trouvais et trouve toujours que l’intérieur du masque sent affreusement mauvais.
Mais au début de cette pandémie, mes pensées étaient remplies d’espoir. L’histoire du virus était encore toute fraîche, venant tout juste de sortir de l’œuf. On ne connaissait encore que les grandes lignes, sans plonger à l’intérieur. J’étais persuadée que nous allions retourner à l’école, que ce n’était que passager et qu’on en rirait plus tard. Ma mère ne cessait de me répéter que cela allait s’allonger à une semaine de plus, ou même encore plus loin. Elle avait raison, mais à ce moment-là, je ne le savais pas. Je répétais sans cesse qu’à la fin des deux semaines, nous retournerions en cours.
Et puis la semaine de plus arriva. Puis une autre, et encore une autre, jusqu’à ne plus en finir. J’ai toujours dit qu’on retournerait à l’école un jour, et je le dis encore. Sauf que maintenant, je suis plus réaliste dans mes propos. Je sais que je n’irais pas à l’école en cette année de 4e. Je sais que la rentrée de 3e risque de ressembler cruellement à celle de la 4e. Je sais que je risque d’être devant mon écran encore un petit moment.

Ces premières semaines à être confinée, je me rappelle avoir fait bien des choses. N’ayant rien d’autre à faire, je rangeais sans cesse ma chambre, tout le temps. J’avais commencé à écrire un livre, chaque jour j’écrivais sans jamais m’arrêter. Je peignais aussi beaucoup. Je peignais tellement que je fus rapidement à court de toile et de peinture. Cette rupture de stock, marqua la fin de mon enthousiasme.
Je m’ennuyais beaucoup. Je ne pouvais pas sortir, je ne voyais personne. J’ai commencé à dévorer les séries Netflix, à me plaindre et à écrire encore et encore. Il y avait une sorte de boule en moi, qui voulait sortir pour me faire prendre conscience de quelque chose. Mais je refusais toujours de la laisser s’exprimer, refusant de voir la réalité en face. Je me voilais la face, c’est vrai. 

J’ai découvert pendant cette période de trouble, que je n’étais pas faite pour être seule trop longtemps. Cela m’a quelque peu surprise, je suis plutôt connue pour m’isoler la plupart du temps. Mais ce manque de vie autour de moi, cette absence pesante, je ne l’aimais pas. D’ailleurs, c’est toujours le cas. Les gens ont commencé à me manquer. Au début, ce n’était pas grand-chose. Et puis cela a commencé à devenir plus grand, jusqu’à être une nécessité. J’avais besoin de voir du monde, de parler pour de vrai.
J’ai commencé à étouffer dans cette routine ennuyeuse. J’avais l’impression que ma vie était encore plus monotone qu’elle ne l‘était déjà. Les jours se ressemblaient tous. Et bien entendu, mes pensées ont choisi ce moment-là pour m’engloutir dans leur monde parfait. Je m’imaginais des voyages, des retrouvailles, des choses que je pourrais faire dehors. Je me suis même surprise à dire que je serais capable de faire une évaluation de maths toute la journée pour autant que je puisse la faire à l’école. A noter que cette matière est celle que j’apprécie le moins…

J’ai commencé à découvrir des choses aussi. Ou plus exactement à redécouvrir des sujets trottant dans ma tête. Petit à petit, j’ai ouvert les tiroirs poussiéreux de ma mémoire. Il en est sorti de vieilles idées, des passions, des sujets que j’avais oublié de traiter. Le temps ne me manquait pas, alors j’ai totalement ouvert ces tiroirs. Très vite, une part de mon énergie du début revint. Je faisais des recherches, je créais, j’imaginais. Je ressortais toutes ces vieilles pensées restées au fond du placard, pour les utiliser une bonne fois pour toute. J’ai commencé à farfouiller chez moi, à essayer de trouver la moindre chose intéressante. J’ai commencé à ressentir encore une fois cette énergie joyeuse. Une période optimiste, créative. J’ai décidé à ce moment-là, par exemple, de m’habiller tous les jours. Car je savais que si je me laissais aller, je tomberais au fond du gouffre. Alors j’étais seule, mais je m’agrippais tant bien que mal. Tous les jours, je m’habillais, faisais des choses. Chaque jour, je rangeais ma chambre de sorte à ne rien laisser par terre. Je lisais ce qu’il me restait dans ma bibliothèque. Quand je voulais changer, j’allais voir dans celle de ma mère.
Je vous parle de m’habiller, c’est vrai c’est plutôt drôle. Mais pour moi, cela représentait (et représente toujours) une manière de rester dans la vie « normale ».

Et puis, les vacances d’été arrivèrent.

Je ne me souviens plus très bien de cette période, c’est très vague. Je suis allé passer mes vacances à Bodrum. En temps normal, depuis ma naissance, je passe un mois chez mes grands-parents, en Alsace, et un mois à Bodrum. C’est pour cela que j’avais un espoir naissant en moi. Mais pour vous mettre dans le contexte, laissez-moi préciser une chose : je suis à moitié alsacienne. L’Alsace est une région en France, à la frontière de l’Allemagne. Depuis petite, j’y vais chaque été sans exception. Cette région représente pour moi énormément de choses que je ne saurais expliquer. C’est bien plus que la maison de mes grands-parents, bien plus… Quand je suis en Turquie, l’Alsace me manque toujours. Comme si j’étais née là-bas, alors que ce n’est pas le cas. Je me surprends souvent à essayer de voir un peu d’Alsace en Turquie. Bref, vous avez le topo. Cette région est pour moi comme un remède qu’il me faut absolument prendre, sans quoi je succombe.
A cette période, le confinement m’avait quelque peu éteint. Alors, avoir cet espoir d’aller un mois en Alsace, prendre ce « remède », me gonflait de joie. Je n’ai jamais été très mer, Bodrum ne m’avait donc pas vraiment rendu heureuse. Même si, il est vrai, que sortir de la ville m’a fait un bien fou.
Mes vacances se passèrent sans encombre. J’étais seule, mais trouvais des choses pour m’occuper. Mais une boule d’angoisse résidait en mon sein, ne voulant pas partir. D’ailleurs, elle est toujours présente. Je sentais que mon espoir d’aller en Alsace s’échappait, et je n’aimais pas ça. Je n’aimais pas ce sentiment.

Et puis, ce qui devait arriver arriva

L’espoir d’aller en France se brisa : je n’y irai pas cette fois-ci… Ce serait trop long à expliquer…  J’ai détesté cette impression d’avoir perdu quelque chose de précieux… Jusqu’ici, ma seule bouée de sauvetage était cet espoir. Mais elle aussi, fut réduite à néant.
J’étais condamnée à rester deux mois à la mer. Je l’avoue, cette phrase est plutôt drôle. Je sais que j’ai eu de la chance de pouvoir m’échapper d’Istanbul. J’étais consciente d’où je me trouvais. Mais quand on a un si grand espoir, réduit en poussière en claquement de doigt… Il est facile de détester l’air marin que l’on respire.
Je devais me sentir chanceuse de pouvoir me baigner, pendant que d’autres restaient enfermés en ville. Et j’étais heureuse, mais… L’Alsace représentait tout pour moi, une échappatoire à cette vie monotone. Alors quand cette affreuse nouvelle vint à mes oreilles, j’ai voulu m’enterrer six pieds sous terre.
Ce fut une période où une amie vint passer quelque temps avec moi à la mer. Voir un proche m’a fait plus de bien que je ne l’aie montré à ce moment-là. Mais malgré tout, ce vide laissé par l’Alsace me rongeait de l’intérieur.

Nouvelle année scolaire

Finalement, la toute nouvelle année scolaire débuta. J’étais de retour à Istanbul, devant mon écran, seule. J’avoue avoir été très soulagée d’apprendre que nos classes n’avaient pas changé. Car il est vrai que la classe que j’ai aujourd’hui est une des meilleures dans laquelle j’ai été.
La rentrée en zoom, c’était plutôt… particulier. Rencontrer ces profs par écran, je pensais que ça allait être difficile. Mais étonnamment, aucune difficulté ne vint compromettre mon apprentissage. Même si je ne voulais pas l’admettre, je m’étais bien habituée aux cours à distance.
Il n’y a rien de marquant à dire durant cette période de reprise des cours. Je suivais le monde extérieur grâce aux réseaux, voyait quelquefois mes amis. Même si ce n’est pas très facile, ma maison étant du côté asiatique tandis que tout le monde est en Europe…

Tiktok, Instagram, Snapchat… Sincèrement, je ne sais pas ce que j’aurais pu bien faire si je n’avais pas eu ces applications. Elles m’ont permis de rester en contact avec le reste de « normalité » dans le monde. Tout le monde dit toujours qu’il y a d’autres façons de s’occuper que les écrans, et c’est entièrement vrai. Mais, je fais la remarque que, en cette période, les réseaux étaient un besoin indispensable.
Quand j’y pense, cela ne fait pas si longtemps. Du début jusqu’à maintenant, des tas de « trends » sont venus submerger les réseaux. Que ce soit les mèches de cheveux d’une autre couleur devant le visage ; les cures de sébum ; et cette tendance incompréhensible de vouloir se refaire le nez soi-disant « moche » (tous les nez sont beaux !). Et encore bien d’autres… Quand il m’arrive d’y repenser, je me dis que ça fait longtemps. Alors que non, au final tout cela c’est passé durant une courte durée.
Cela montre que, durant cette période enfermée où le temps semble s’être arrêté, eh bien… le temps passe vite, plus vite que je ne le croyais. 

Et puis, la période des fêtes de fin d’année arriva

Et avec les fêtes qui approchaient, un nouvel espoir. Très vite, l’idée d’aller en France devint une obsession. J’y pensais nuit et jour, prévoyant mon voyage dans ma tête. M’imaginant décorer le sapin, comme chaque année, chez mes grands-parents. J’imaginais les flammes des bougies danser sous mes yeux, tournoyant dans leurs robes rougeâtres. Je pensais au beau sapin décoré de boules plus belles les unes que les autres. Je m’imaginais respirer à pleins poumons cet air de campagne qui me manquait tant. L’idée de passer mes vacances dans ma région adorée me rendait heureuse. Cette idée était ma bouée de sauvetage dans cette période confuse. Je m’y accrochais de toutes mes forces, essayant tant bien que mal de ne pas la laisser s’échapper.

Novembre. Je n’oublierai jamais ce mois d’incertitude. Jamais je n’avais manqué un Noël en Alsace, et ne voulais surtout pas que cela arrive. De nouveau, la même inquiétude qu’en été refit surface. La même boule d’angoisse revint, encore plus grande qu’auparavant. Je ne pouvais pas rater mon Noël en Alsace, cette idée était tout simplement inenvisageable. Cette pensée me répugnait. Si je le pouvais, j’aurais froissé cette idée comme du vulgaire papier avant de la jeter dans ma poubelle de mauvaises pensées. Mais cette idée ne voulait pas partir, elle s’obstinait à rester dans ma tête. Elle me chuchotait à l’oreille quelque chose que je redoutais au plus profond de moi. Elle me soufflait une chose que je savais déjà.

Je ne suis pas allée en Alsace

Les raisons sont multiples… Le plus important à retenir ici, c’est que mon tout dernier espoir était parti en fumée. Ce moment où nous avons l’impression de tomber au fond d’un trou sombre et glacial. Tous mes rêves s’étaient brisés, comme s’ils n’avaient jamais existé. Le monde meurt, crie de douleur. Mon monde s’éteint, acceptant son malheur.
Les fêtes arrivaient à grand pas. Malgré mon espoir envolé, j’ai pris la décision de passer de bonnes fêtes à Istanbul. Les décorations affluaient dans la maison, les bredalas (biscuits alsaciens) de Noël amenaient une douce odeur de magie dans chaque pièce. Quelque chose me manquait, terriblement. Mon Noël en Alsace me manquait énormément. Mais je n’en laissais rien paraître, déterminée à passer un bon Noël.

Photography of buildings, Alsace, France. Pierre Blaché / Pexels

Et puis, les fêtes arrivèrent

Tout s’est bien passé à vrai dire. Au nouvel an, j’ai même eu le bonheur de retrouver mon chat qui s’était perdu quelques jours auparavant. Je me souviens avoir pleuré de joie, ce qui m’a surpris. Je ne crois pas avoir déjà pleuré pour une bonne nouvelle. Mon chat était mon petit miracle de Noël.
Le temps passait, Janvier était là. Peu à peu, la magie des fêtes s’estompait. Et elle s’arrêta définitivement quand mon petit miracle de noël s’éteignit. Mon chat retrouvé au nouvel an, s’était définitivement éteint. Elle a quitté ce monde après s’être battue pendant 14 ans, et j’en suis fière. Je tiens à préciser, pour lui rendre hommage,combien elle était incroyable, sublime. Cette affreuse nouvelle fut la goutte qui fit déborder le vase comme on dit.

Suffit corona !

J’en avais marre. Rien ne se passait correctement et ça commençait à me taper sur le système. Février approchait, ainsi que mon anniversaire. C’est bien la seule chose qui me permit de contenir ma colère. Fêter mon anniversaire avec mes amies me fit un bien que j’attendais désespérément.
Ça y est. J’avais 14 ans. J’étais partagée entre l’idée que c’était une bonne chose, ou une mauvaise. J’avais enfin atteint mes 14 ans. Mais j’étais confinée, pendant un âge où je pensais m’amuser.
Ce moment où nos espoirs n’étaient qu’illusions. Jusque-là, j’avais gardé espoir, espérant voir un jour le bout du tunnel. Et cela va arriver bien sûr, mais pas de sitôt… Je me souviens de mon moi d’il y a 5 ans, rêvant de sa vie à 14 ans. Je me souviens avoir imaginé des souvenirs que je me créerais à cet âge. Aujourd’hui, je voudrais retourner dans le passé. Dire à cette petite fille que ses 14 ans ne seraient pas remplis de bonheur. Lui dire que son adolescence serait « enfermée ».

Les moindres petites choses de l’école me manquent. Je serais capable de faire une évaluation en première heure de cours, quand il fait encore nuit dehors. Même l’attente interminable pour faire signer une absence au BVS me manque. Même l’impatience que je ressentais quand je devais faire passer d’abord les plus petits à la cantine me manque. Même ce bon vieux Bloc H ou l’on est tous serrés comme des sardines me manque. Cette montée interminable pour aller aux « servis » ; ces bousculades quand il fait froid et que l’on est tous dans le Bloc A ; cette attente pour acheter un toast trop cher à la cafétéria ; cette déception quand le CDI est plein, et qu’il y a du poisson au menu de la cantine… Toutes ces petites choses déplaisantes me manquent.

Un peu de positif

Oui, le corona est un vrai fléau. Cependant, il y a quelque chose de positif dans tout ça. Une chose plutôt ironique d’ailleurs. Je me suis rapprochée de mes amies. Je veux dire, on est devenu de « vraies amies ». Jamais je n’avais autant parlé avec elles, jamais je ne m’étais autant ouverte. Je leur disais tout, comme si c’était elles mon journal intime. Elles sont, en cette période, d’une aide incroyable. Et c’est fou de se dire, que l’on s’est rapprochées en étant à distance. Je tiens vraiment à préciser ici combien elles ont été et sont toujours d’un grand soutien. Merci à elles.

Hands with latex gloves holding a globe with a face mask, Anna Shvets / Pexels

Surprise ! J’ai finalement pu aller en Alsace. Comment je me suis senti ? Cela faisait très longtemps que je n’avais été si heureuse. Je me sentais pousser des ailes, joyeuse, n’osant croire à ce qu’il m’arrivait. Ces courtes vacances ont probablement été l’un des meilleurs épisodes de cette période. Je me souviens encore de cette boule d’angoisse disparaissant à mesure que je m’approchais de l’Alsace. Je me souviens avoir enfin pu respirer librement. J’avais tant besoin de ce voyage, tant besoin de cet air familier. Entendre les gens parler français dans les rues, les maisons, les boulangeries… Mais surtout, les librairies. Durant toutes ces vacances, je n’ai fait que rentrer dans toutes les librairies possibles. A mon retour à Istanbul, une valise entière était consacrée à mes livres. J’étais heureuse. J’avais refait mon stock de livres à lire et revu ma région préférée.

Aujourd’hui ? 

Plusieurs choses. J’attends les grandes vacances pour passer deux mois en Alsace, et refaire mon stock de livres une énième fois. Cette fois j’y vais : rien ni personne ne pourra m’en empêcher. J’ai l’espoir de retourner à l’école l’année prochaine. Et j’espère que mes 15 ans seront plus joyeux. 

Mais surtout, j’ai changé. Si l’on compare mon moi d’avant le Covid-19 (et non pas LA Covid-19 ! ce changement est ridicule) et maintenant, il y a une différence radicale. J’ai grandi, changé même en apparence, et j’ai de nouvelles ambitions. Je me demande souvent, comment j’aurais été s’il n’y avait jamais eu de coronavirus. Différente, probablement. 

J’aimerais bien savoir s’il existe un monde parallèle, où le coronavirus n’a jamais planté ses crocs empoisonnés sur la terre. Si ce monde là existe, j’y cours de ce pas retrouver tout ce que nous avons perdu ! 

Lara Güngör, 4D

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